À lire les yeux ouverts, le cœur un peu fermé.
C’est étrange, elle était là je m’en souviens. J’étais là pour elle, et elle pour moi. 4 années de journées rythmées par le son des notifications.
Et puis plus rien. Enfin si, comme pour compenser, une lettre est venue s’ajouter à ma vie pour en redéfinir le contenu. Désormais je vis mon vide.
Je n’ai jamais eu aussi froid le soir en me couchant. Alors oui son corps me tenait au chaud, mais pas autant que ses mots. Ceux là qui du jour au lendemain ont décidé de fuguer s’envolant sans promesses avec ces 4 années de tendresse.
En les regardant disparaître devant le soleil, dans une dernière lueur d'espoir, je m’apprête à les rattraper mais c’est impossible pour un oiseau sans aile de tenter de voler après un atterrissage d’urgence dans un bosquet de roses fanées.
“Voilà ton arrêt chéri”
“Ah oui !” que je t’ai dit d’un air convaincu, comme si cette gare perdue entre Confort et Inconnu allait m’accueillir à bras tendus. A quoi bon de toute façon? Tes nouveaux douaniers m'auraient pas laissé continuer.
C’était une plateforme goudronnée, transpirant la tristesse au point de réfléchir la lumière d’un lampadaire solitaire surplombant un guichet condamné, orné d’un papier griffonné qui disait “pas de ticket”.
Un immense frisson m’a traversé les épineuses du sacrum à l’occiput, ici c’est le temps qu’on attend.
Le cocktail de ton silence et de ton indifférence m’a fait douter de la beauté et de la saveur de nos happy hours.
J’ai longtemps pensé qu’on serait dévasté, qu’on pleurerait séparés, qu’on devrait réapprendre à marcher, que nos souvenirs allaient allonger nos journées, que la santé de l’autre allait nous préoccuper, que des regrets allaient émerger, que nos habitudes allaient nous rattraper, que nos attentions inonderaient nos pensées.
En somme, je pensais qu’on allait se manquer.
J’en étais persuadé, on en avait déjà parlé.
Force est de constater que je ne m’étais trompé qu’à moitié.
Être spectateur à contre cœur d’une vie que j’aurais aimé vivre à tes côtés, ça rend les choses très compliquées.
Cette vie à t'accompagner j’en avais rêvé, mais il est temps pour moi de te regarder t’éloigner sans te retourner, un sourire éclatant et les yeux souriants, rattrapant une vie que tu avais peur de rater en restant à mes côtés.
Qui y a t’il de plus douloureux que de ne pas manquer à la personne qui te manque le plus au monde ?
Ce livre lourd de souvenirs que je n’ai pas le courage de fermer n’est en réalité qu’une page à tourner pour la personne qui a décidé de l’ignorer.
La chute de spécial à banal fait reconsidérer le blessé comme polytraumatisé.
“Prends soin de toi.” Ce sont les derniers mots que tu m’as adressés en plongeant ton regard humide mais libéré sur le mien dévasté.
Je vais apprendre à le faire doucement mais sûrement. Tu n’en sauras rien, tu ne t’en rendra même pas compte. Au fond, cette dernière locution n’était pas de l’affection mais une façon polie de clore la conversation.
Des paroles en l’air qui ont servi de déguisement à la formule “j’en ai rien à faire”.
C’est quand je veux prendre l’air et qu’il est tard qu’ils errent comme des bâtards entre Fougères et la rue Mouffetard.
Il y a des bas et des hauts, des moments où je rêve, d’autres où je me relève.
Je m’accroche à sa mélancolie, sa solitude apparente pour me sentir exister dans un esprit que j’ai l’impression d’avoir depuis longtemps quitté.
Souvenirs et avenirs, alliés pour briser le miroir de notre histoire.
Celui qui reflétait l’espoir d’un voyage mouvementé, sublimé par la lumière d’un foyer.
Les dernières braises consumant lentement ce même bâtiment en y emportant un semblant de rire innocent.
Elle n’aura ni tes yeux, ni tes cheveux.
Une connaissance, en fait c’est ce que je suis devenu, l’ombre d’un homme avec qui elle a passé des années désormais brumeuses.
Un inconnu qu’on connaît.
Celui à qui on dit bonjour par intermédiaire.
Un signe de tête téméraire ornée d’un sourire précaire.
Malgré ça, malgré toi, malgré moi. Merci.
Quelle chance cruelle c’est d’avoir quelque chose qui rend les adieux difficiles.
Je t’aime, heureuse.